Tristes, déçus et résignés par l’annonce de la fermeture des studios Telltale, les joueurs de l’adaptation du Comic à succès The Walking Dead ne pouvaient qu’être indulgents avec la saison finale, sauvée par l’éditeur de la BD lui-même au dernier moment. Après une digression pas forcément pertinente lors de la saison 3, sans doute guidée par l’appât du gain, cette « Ultime Saison » bien nommée nous ramène auprès de Clementine et AJ, pour une conclusion que l’on espérait plus.
Waiting Around to Die (The Be Good Tanyas | Chinatown)
Pour les nouveaux venus souhaitant s’initier à la série, sachez que même si vous pouvez tout à fait commencer par cette dernière saison, il est néanmoins préférable de commencer par faire les trois précédentes. En effet, si vous commencez directement à ce stade de l’aventure, votre attachement aux personnages et à leur vécu ne permettra pas au jeu d’avoir le même impact. Vous pouvez par contre vous dispenser du spin-off avec Michonne, qui, bien qu’il soit un très bon épisode, n’a aucun impact sur cette dernière saison. Il en est d’ailleurs l’épisode idéal si vous désirez avoir un avis éclair sur la série, puisqu’il se boucle en 4 à 6h et se trouve être totalement indépendant.
De plus, on entend régulièrement de la part de joueurs aguerris que la série des Walking Dead par Telltale ne fait qu’usurper son titre de « jeu vidéo » ; en un sens, il est vrai que l’on est plus près d’une série interactive à proprement parler. Les cinématiques sont légions, et les interactions somme toutes limités. Pour ma part, je pense qu’on est ici en face de l’héritier moderne du genre « Point n’ Click » dont les représentants les plus connus sont les Monkey Island, et qu’à aucun moment l’œuvre ici présente ne prétend être autre chose. On peut effectivement lui reprocher d’ailleurs de ne pas être vraiment bonne dans les phases d’actions, la faute à des QTE pas toujours bien calibrés (trop rapides, aux choix de touches contestables), néanmoins c’est passer à côté de l’essence même de ce qu’est le bébé de feu Telltale.
En effet, l’intérêt ludique n’est pas dans l’action, mais dans les choix permis et leur incidence sur l’histoire. Si là aussi on peut les trouver assez restreints en termes d’impact, l’équilibre entre narration imposée et choix pour le joueur est un exercice difficile. Pourtant, le jeu s’en sort fabuleusement bien ce qui lui permet même d’avoir une aura unique. Pour autant, libre à chacun de ne pas y adhérer et passer son chemin pour aller chercher des jeux au gameplay plus pêchu.
Take Us Back (Alela Diane | To Be Still)
Pour ce final, les développeurs donnent vraiment l’Impression d’avoir entendu les critiques sur le côté trop conservateur du jeu. Néanmoins, s’ils ont tenté beaucoup de choses, elles sont plus ou moins réussies. En effet, on a clairement plus d’embranchements que dans les saisons précédentes, et ceux-ci ont plus d’impact (comme par exemple l’évolution d’AJ). Celui-ci agira en effet en fonction des valeurs et règles que vous lui communiquerez, parfois de manière vraiment surprenante, un excellent point! Par contre, et peut-être est-ce la faute du contexte de développement, les environnements sont moins nombreux et variés, ce qui donne une sensation de tourner en rond.
Si les développeurs de ce The Walking Dead ont d’ailleurs conservé les icônes incrustées des QTE du spin-off prenant Michonne pour héroine, on sent une influence des derniers Tomb Raider dans la manière de contrôler Clementine et des actions possibles avec cette dernière. Nous avons donc droit dans cet opus à une caméra épaule / dos du plus bel effet (surtout dans un jeu de zombies), du tir à l’arc, de l’infiltration et même un système de couverture face à plusieurs opposants… dommage qu’ils n’aient pas osé pousser la chose plus loin, mais peut-être ne voulaient-ils pas se couper d’une partie conséquente de leur audience, non-joueurs à la base, qui auraient eu plus de mal à progresser dans le jeu. Encore à propos des QTE, on ne peut qu’être déçu que certains d’entre eux soient encore non intuitifs ou trop courts dans le délai imparti, menant à une mort injuste. Heureusement, cela n’arrive que peu.
Gun In My Hand (Dorothy)
Si le premier épisode de cette saison 4 peine à démarrer, ce n’est que pour mieux nous surprendre ensuite. La galerie de personnages est variée et ils sont très bien écrits. Chacun possède son caractère propre, sans jamais être une caricature de lui-même. D’ailleurs, malgré certains raccourcis de scénario faciles inhérents à la formule, l’histoire principale nous guide à travers des moments de poésie incroyable, renforcés par le contexte post-apocalyptique, propice à une exacerbation des sentiments. En jouant, on ne peut s’empêcher de faire le rapprochement avec les Enfants Perdus de Peter Pan, voir même la lutte de pouvoir et l’instinct de survie bestial du livre de William Golding « Sa Majesté des Mouches ». C’est rafraîchissant, et c’est tant mieux.
Plus que les facilités de scénario que j’ai citées précédemment, l’autre défaut que l’on pourrait mettre en avant est la tendance de certains personnages à enclencher de longues discussions au milieu de nulle part, et plus particulièrement à proximité de potentielles hordes de rôdeurs. Néanmoins, fi de cela, on a globalement affaire à une mise en scène cinématographique pertinente, fine et adaptée, qui met fabuleusement en valeur la direction artistique du titre, toujours aussi incroyable. De plus, grâce aux animations faciales toujours plus précises, les développeurs arrivent à renforcer la crédibilité des personnages, paraissant toujours plus humains malgré leur design de bande dessinée. Un sacré tour de force.
Concernant la partie technique, le jeu tourne tout à fait correctement, malgré quelques rares ralentissements, surtout quand les effets de particule sont légion (feu, eau, lumière…). Attention également au côté portable de la console de Nintendo pour The Walking Dead, non pas pour des raisons de ralentissement cette fois-ci, mais pour l’immersion : jouer dans le métro n’a pas la même saveur que confortablement installé dans son canapé, la nuit étayant toujours plus cette ambiance de peur et d’inconnu.
Where Did You Sleep Last Night (Nirvana)
Grand fan de la bande dessinée d’origine, dont je trouve la version télévisée clairement passable, je vais profiter de ce dernier paragraphe pour donner un avis plus personnel. Pour moi, le jeu de Telltale, malgré les nombreux défauts que j’ai cité tout au long de ce test, est la meilleure adaptation du matériau d’origine. On sent dans chaque aspect la volonté de respecter ce dernier, le tout dans un style de jeu accessible, dont peu de studios peuvent se vanter d’en maitriser les aspects (ne me vient à l’esprit que Quantic Dream). Ainsi, si le final de la saison 2 de The Walking Dead restera l’événement le plus marquant de mon aventure, cette « Ultime saison » m’a également permis de vivre un moment incroyable de mon parcours de joueur. D’une part parce-que c’est la saison la plus fournie en termes ludiques, et d’autre part pour la gratitude que j’éprouve envers les employés de Telltale, coincés dans une situation inacceptable, et qui, malgré cela, ont réussi à mener le projet à son terme.
Enfin, n’y voyez aucun indice sur l’intrigue, mais je ne peux finir ce test sans saluer l’un des personnages qui m’ont le plus touché dans ma vie de joueur. Si jamais vous ne souhaitez pas lire ce message personnel, ne tenez pas compte de cette dernière ligne. Je vous souhaiterai simplement une excellente aventure.
A toi, Clementine, à bientôt. On se voit de l’autre côté.
Avis final
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Avis final - 85%85%
Résumé
Adressée aux joueurs des saisons précédentes, cette nouvelle itération n’aura aucune peine à convaincre : plus fournie, mieux rythmée, et surtout conclusive, elle fait mouche. Pour les nouveaux arrivants, je ne saurais que conseiller de passer par les saisons précédentes afin de pouvoir profiter au maximum de l’attachement aux personnages de ce final. Aux réfractaires de toujours, le jeu ne se renouvelle pas assez pour vous intéresser, et vous pouvez passer votre chemin.
Visitor Rating: 98%