Mon petit cœur de joueur n’a pas encore trouvé chaussure à son pied en ce début d’année 2021 sur Switch. Alors quand l’équipe derrière Furi – l’un de mes crushs de 2016 – nous a annoncé l’arrivée de son dernier projet en date nommé Haven sur la dernière console de Nintendo pour ce début de mois de février, je me suis logiquement empressé de charger mes plus beaux Joy-Con et de mettre le reste de mon backlog au placard pour me préparer au mieux à ce premier rendez-vous qui faisait déjà battre mon palpitant à vive allure. Haven allait-il être l’élu ? Serait-il le titre qui marquera mon premier trimestre 2021 comme d’autres avaient réussi à le faire les années précédentes ? Autant de questions qui trouveront réponse dans ce test aux allures de speed dating.
Les premiers instants où mes yeux se posèrent sur Haven furent synonymes d’intense soulagement. L’œuvre de The Game Bakers avait ainsi fait le bon choix de ne pas mentir sur son apparence lorsqu’il faisait l’apanage de sa jolie direction artistique alors qu’il tentait de séduire des centaines de joueurs à travers le monde à gros coups de trailer. Haven tient effectivement parfaitement la route sur Switch et se permet même le luxe de maintenir une résolution plus que convenable tandis qu’un solide framerate, malgré quelques chutes intempestives, rendait nos premiers échanges plus qu’agréables. C’est donc sans lunettes de près pour moi, et au naturel sans fond de teint qui craquèle pour Haven que nous avons eu l’occasion de faire plus ample connaissance.
A l’Haventure
Une étape obligatoire, soit dit en passant, tant Haven ne fait pas les choses comme les autres. Si vous vous attendiez par exemple à retrouver la formule nerveuse et exigeante de Furi, vous vous mettriez le doigt dans l’œil. Non, Haven nous prévient de suite : il n’est pas à la recherche d’une aventure tumultueuse, mais plutôt d’une relation simple et facile qui lui permettrait de se laisser calmement découvrir par son futur partenaire de jeu. Une ambition qui colle d’ailleurs parfaitement aux envies de ses deux personnages principaux, Yu et Kay, que l’on rencontrera dès le début du titre, bien au chaud à bord de leur vaisseau amarré sur une planète inhabitée, alors qu’on les devine très vite en fuite.
À peine le temps d’apprécier quelques-uns de leurs dialogues à choix de réponses multiples – sans réels impacts sur la suite de la discussion – sur fond de cuisine pour l’optimiste Kay ou de mécanique pour la tempétueuse Yu et de remarquer l’excellente qualité des doublages de notre joli couple de héros que nous voilà déjà dehors à parcourir les plaines bleutées de cette étrange planète qu’ils nommeront Source. Première surprise, Kay et Yu marchent, mais ne courent jamais. Pour se déplacer rapidement, les deux tourtereaux préféreront surfer au-dessus du sol. Une manière ludique de se mouvoir, légèrement entachée par l’impossibilité de pouvoir tourner la caméra une fois lancé dans notre course folle et qu’il sera nécessaire de maîtriser pour pouvoir recharger nos bottes avec de l’onde. Cette énergie, disponible en grande quantité sur Source pourra être récupérée en suivant les filets qu’elle formera par terre – et plus tard dans les airs – et nous permettra également de passer d’îlot en îlot – avec un écran de chargement systématique en prime, parfois un peu long à disparaitre.
De rouille et bosse
Et des îlots, nous allons devoir en parcourir puisque le vaisseau de nos aventuriers sera rapidement mis hors d’état de fonctionner. Kay et Yu n’auront d’autres choix que de partir à la recherche d’éléments pour réparer leur nid douillet, tout en prenant soin de récolter assez de nourriture et de plantes médicinales pour survivre. Dans le même temps, nous nous rendrons bien vite compte que tout n’est pas aussi rose sur Source. Loin d’être aussi vide de toute trace de civilisation qu’elle ne le laisse penser, cette planète nous réservera quelques secrets au cours d’un scénario qui, s’il ne reste pas dans les annales du jeu vidéo, se laissera suivre sans souci. Surtout, cette même planète est gangrenée par la rouille, une substance rougeâtre qui suinte de terre et qui vient corrompre la faune et la flore locale. Il nous incombera alors la tâche d’aller nettoyer notre nouveau foyer d’accueil, tout en libérant les bêtes sauvages de cette étrange pollution.
Plus concrètement, il nous faudra survoler ces amas de cristaux rouges avec nos bottes chargées d’onde et pacifier ces pauvres bêtes sauvages durant des combats au tour par tour où l’on vous demandera de vous diviser en deux. Haven a, en effet, pris le parti de vous faire jouer Yu et Kay en même temps pendant ces affrontements. Les actions – bouclier, attaque au corps-à-corps, tir à distance et pacification – de l’un étant accessibles avec la croix directionnelle de gauche de votre Switch, tandis que l’autre sera contrôlable via les quatre boutons de votre Joy-Con de droite. Anticiper un bouclier avec Kay pour couvrir la prochaine estocade de Yu sur un monstre qui se retrouvera par la suite étourdi sera, par exemple, l’un des petits combos sympathiques que vous pourrez effectuer lors de ces escarmouches dynamiques, diversifiées et joliment mises en scène – si l’on excepte les invectives de nos héros, assez rébarbatives et crispantes après quelques heures de jeu.
Explo, cuisto, dodo
Une légère faute de goût malvenue tant la caractérisation des deux membres du couple est réussie. C’est simple, Yu et Kai sont loin d’avoir une personnalité unidimensionnelle comme l’on en voit trop souvent et sont aussi attachants qu’exaspérants, avouons-le. Qu’on s’entende bien : l’évaluation de l’écriture de ces deux protagonistes sera, à mon sens, plus personnelle qu’autre chose puisque l’on ne s’affranchira pas de quelques clichés dignes des meilleures comédies romantiques (coucou les retrouvailles poignantes sur fond de musique épique). La bonne question à se poser sera alors de se demander si ces petits poncifs seront, au final, si éloignés de la conception que vous vous faites d’une vie à deux ou s’ils seront bel et bien représentatifs de ce qu’un couple peut vivre, selon votre propre expérience.
Malheureusement, la mienne d’expérience s’est parfois confrontée à ce qui fait le plus défaut à Haven : la routine. Le titre de The Game Bakers saute les deux pieds joints dedans. La faute à une boucle de gameplay qui devient très vite redondante. Comme notre nouvelle mission de nettoyage planétaire le laissait présager, Haven ne parvient pas à renouveler l’intérêt du joueur pour aller farfouiller un peu plus en profondeur les étendues de son monde. Le jeu n’a que trop peu d’environnements, de rebondissement dans son histoire et de surprises dans son gameplay pour aller plus loin que le sympathique divertissement à l’eau de rose qu’il est.
Au bout de 5 heures de jeu, nous aurons à peu près fait le tour de tout ce qu’il aura à nous proposer. Le bestiaire ne se renouvellera qu’à de trop rares occasions. Manger, se soigner, jardiner, ou faire une sieste avec nos deux amoureux finira par n’avoir plus d’autres intérêts que de remplir une fonction purement utilitaire une fois toutes leurs petites cinématiques associées déjà visionnées. Bref, Haven s’essouffle bien trop rapidement avant d’atteindre un peu tardivement un final à l’intensité folle qui a su, malgré tout, me mettre la larme à l’œil.
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Haven : amour, gloire et regrets - TEST
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Cupidon a raté la cible de peu - 69%69%
Cupidon a raté la cible de peu
“Je préfère qu’on reste amis“. Voilà ce que j’aurais pu dire à Haven après avoir passé une bonne dizaine d’heures en sa compagnie. Des heures qui furent tantôt joyeuses lorsqu’il me narrait les péripéties de ce jeune couple rempli d’espoir, d’idéaux, de doutes et écrit avec justesse, tantôt fastidieuses quand la routine du explo, cuisto, dodo s’est emparé de notre relation. Au final, je préférais lui dire “non, mais ce n’est pas toi, c’est moi le problème” tant mes attentes étaient peut-être légèrement trop élevées pour ce qui s’avère être, tout de même, un titre sympathique à la personnalité marquée et à la démarche aussi honnête dans le propos que maladroite dans l’exécution.
Les +
- L’écriture des personnages de Yu et Kay.
- Un jeu facile à prendre en main.
- Des combats au tour par tour dynamique et plaisant.
- Un portage sans réels soucis techniques sur Switch.
- Un final impactant.
- La bande sonore magistrale, signée Danger.
- Un mode coopération qui vient masquer quelque peu la routine du titre.
Les -
- Quelques chutes de framerate à déplorer.
- Des choix de dialogues sans grand intérêt.
- Les écrans de chargements à chaque fois que l’on change d’îlot.
- Pas possible de bouger la caméra en surfant.
- Une boucle de gameplay qui s’épuise rapidement.