Me revoilà à venir vous vendre ce jeu. Mais que voulez-vous ? Il est suffisamment rare que j’apprécie autant un jeu de plateforme pointu pour que je puisse vous ennuyer avec de temps à autre. J’ai pu avoir la chance de m’entretenir (via Discord, covid et distance obligent) avec le duo de développeurs catalans d’Astral Pixel, le jeune studio à l’origine du jeu de plateformes magnétique Super Magbot que j’ai pu tester le mois dernier pour Switch-Actu. Dans un but de transparence, sachez que cet échange a été réalisé en anglais et enregistré avec l’accord de mes interlocuteurs, à savoir les deux uniques développeurs du studio : Eloi et Dani Guzman. Je vous laisse donc avec la première partie de cette série de questions-réponses. Nous y avons abordé la genèse du projet et avons essayé de cerner à qui peut s’adresser le jeu.
Pouvez-vous vous présenter pour nos lecteur·ices ?
Eloi : Bonjour, je m’appelle Eloi. J’ai travaillé en tant que programmeur durant toute ma carrière. Pour Super Magbot, je me suis mis au pixel art. J’ai réalisé toute la partie visuelle du jeu, mais j’ai aussi participé à sa programmation.
Dani : Je m’appelle Dani. Nous sommes touts les deux des ingénieurs en informatique. Comme l’a dit Eloi, il s’est concentré sur la partie artistique du jeu tandis que j’ai été en charge de la partie programmation logique, ainsi que level design.
Eloi : Nous sommes deux frères ayant choisi de faire ce projet ensemble.
C’est une belle initiative. Je suppose que l’idée de ce projet existait depuis longtemps ?
Eloi : Oui, nous avons eu cette idée il y a un bon moment. Mais nous avons travaillé dans des entreprises de nouvelles technologies entre-temps. Un jour, nous nous sommes décidés et nous avons décidé de quitter ce travail pour nous lancer dans le développement de notre jeu.
Dani : Nous avons eu l’idée des années avant de commencer le développement. Elle était un peu différente alors, mais le concept de déplacement via des aimants était déjà là. Cela dit, ça ne ressemblait pas au résultat final de Super Magbot.
Vous aviez donc l’idée centrale longtemps avant de débuter. Comment le développement s’est déroulé ? Est-ce que l’idée s’est transformée via des prototypes successifs ?
Dani : Nous avons commencé avec un prototype très simple. Je veux rappeler que c’est notre tout premier jeu, nous ne savions pas comment fonctionnait l’Unreal Engine [moteur utilisé par Super Magbot ndlr]. Au début, nous avons beaucoup appris sur le fonctionnement de Unreal et nous avons créé un petit prototype à partir de notre vieille idée. Mais au bout d’un an de travail, nous n’étions pas satisfaits du résultat. Nous avons hésité à arrêter pour retourner à nos anciens emplois, mais nous avons préféré continuer et modifier beaucoup de choses pour rendre le jeu beaucoup plus amusant que ce premier prototype.
Eloi : C’est une longue histoire. Nous nous sommes posés un jour en nous disant “Ce jeu n’est pas assez amusant, nous ne pouvons pas être fiers de ça”. Bien sûr, ce n’était qu’un prototype mais l’idée était quand même là. Nous avons décidé de changer beaucoup de choses. En quelques jours seulement, le jeu est devenu radicalement différent. Nous avons modifié les distances, le nombre de blocs à l’écran, la gravité ainsi que le mouvement et la vitesse, la taille du personnage, la portée de l’aimant etc. C’est là que nous avons eu le déclic. Nous disons souvent que c’est à ce moment précis que Super Magbot est réellement né car nous nous sommes dits “OK, maintenant nous allons pouvoir travailler à partir de ça et en faire un jeu vraiment cool”. C’est ce moment où vous réalisez que vous avez quelque chose de brut entre les mains, et qu’il ne reste qu’à le façonner pour le rendre vraiment génial.
Quand je commençais un niveau dans Super Magbot, je commençais souvent par observer pour identifier les obstacles, mémoriser quelles commandes utiliser au bon moment pour les surmonter etc. On retrouve là un aspect puzzle. C’est un choix de design délibéré d’inciter à réfléchir avant de se lancer dans le niveau ?
Eloi : Planifier le parcours fait partie du fun d’un puzzle-platformer. Mais nous nous sommes rendus compte qu’il y avait deux types de joueur·euses. Il y a le genre qui pense avant d’essayer le niveau…
Dani : … et qui prépare vraiment chaque séquence avant de se lancer. Mais d’autres vont juste foncer dans le tas !
Eloi : Oui, certain·es ne planifient pas du tout. Dans ce cas, il s’agit alors de se fier à sa mémoire musculaire pour faire le niveau le plus vite possible, en mourant à répétition jusqu’à ce qu’on y arrive. Nous avons voulu jouer avec l’esprit des gens pour mettre leurs réflexes à l’épreuve. Par exemple, nous nous sommes aperçus que quand on utilise l’aimant rouge, le cerveau veut naturellement alterner avec le bleu et continuer comme ça “Rouge, Bleu, Rouge, Bleu”. Nous nous sommes alors dits que, en brisant cette séquence, nous pouvions créer un challenge pour la personne qui joue.
Vous avez fait des play-tests pour réaliser tout ça ?
Dani : Oui. En fait, en devenant vraiment très bon·nes au jeu, vous pouvez déterminer les bons inputs à réaliser en même temps que vous les faites, c’est ça qui rend le jeu intéressant en speedrun. Certaines personnes sont plus lentes et vont devoir réfléchir à la solution avant de se lancer dans une séquence. Ce sont des styles de jeu différents mais je pense que les deux sont appropriés. Le jeu est un puzzle-plateformer, mais il permet aussi de réapparaître très vite quand on meurt, donc quelqu’un qui veut faire du speedrun n’aura pas de problème en cas de morts à répétition.
Voilà qui conclut cette première moitié d’interview. J’aurais apprécié la faire figurer ici en entier, mais la vie est malheureusement faite de choix difficiles ! Notre échange a été d’un intérêt certain mais surtout d’une longueur à faire pâlir Dying Light 2. Blague à part, vous pourrez retrouver la seconde partie de cet entretien dès demain dans un second article.