Soixante-huit milliards et sept-cent millions de dollars. C’est le prix qu’a payé Microsoft pour racheter le géant Activision-Blizzard le mois dernier. Un record de démesure pour l’industrie du jeu vidéo, et une porte de sortie toute trouvée pour son PDG Bobby Kotick responsable des disfonctionnements en interne (harcèlement sexuel, viols, menaces de mort etc.). Sony a emboîté le pas à son concurrent en rachetant pour la bagatelle bien plus raisonnable de 3,6 milliards de dollars le studio Bungie à l’origine des premiers Halo ou encore de Destiny. Cette fièvre des rachats ne semble plus vouloir s’arrêter. Microsoft, l’acteur le plus féroce en la matière, avait déjà acquis Bethesda en l’an de grâce 2020.
Nintendo n’est pas étranger à cette pratique, même si les acquisitions se font plus rares du côté de la firme de Kyoto. MonolithSoft a rejoint les studios first party de Big N au début de la dernière décennie et Next Level Games a suivi l’an dernier. Face à de tels flux financiers dans un marché du jeu vidéo pesant de plus en plus lourd au sein du divertissement en général, nous sommes nombreux·ses à nous demander qui sera le prochain à passer sous le giron de plus gros que soi. Nombre de studios pourraient sauter le pas, dont un certain PlatinumGames qui entretient de bonnes relations avec des éditeurs comme Nintendo ou Square Enix. Son PDG Atsushi Inaba a pu évoquer cette hypothèse lors d’une interview accordée à VGC :
Le plus important pour nous, c’est la liberté créative vis-à-vis des jeux que nous voulons créer. D’après ce que j’ai entendu à propos des acquisitions récentes, je ne crois pas que Microsoft compte faire de la micro-gestion chez Activision en les privant de liberté… Je pense que ce ne sera pas une relation de ce genre.
Il devrait y avoir beaucoup de respect mutuel, et je crois qu’Activision pourront continuer à faire ce qu’il font de mieux. C’est aussi ce qui compte le plus à nos yeux, quelle que soit la direction que prenne notre entreprise. Ainsi, je ne rejetterais pas en bloc la moindre proposition de rachat, pourvu que notre liberté créative soit assurée.
Une position pour le moins intéressante compte tenu des antécédents de PlatinumGames. Inaba déclarait en 2020 (il était alors directeur adjoint) que le studio n’était pas intéressé par un rachat par Microsoft pour préserver son indépendance. Pas plus tard que la semaine dernière, le PDG annonçait vouloir orienter le studio vers des jeux pouvant “être appréciés et aimés pendant une plus longue période”. Un appel du pied à peine voilé à la dynamique des jeux-services, dans laquelle Babylon’s Fall s’inscrit tout naturellement. Le cofondateur de PlatinumGames tempérait tout de même son discours en disant vouloir continuer les jeux à la Bayonetta ou à la Sol Cresta tout en grossissant les rangs de la société. L’avenir nous dira si PlatinumGames parvient à jouer sur tous ces tableaux simultanément, en toute indépendance ou non.