Si je dois avouer être un peu limitée sur ma connaissance de Carmen Sandiego, cela n’empêche pas la voleuse d’être une icône des médias jeunesse depuis 1985 et le premier jeu vidéo la mettant en scène. Depuis, nous avons eu droit à de multiples jeux, livres, films et séries reprenant le personnage, mais c’est sans nul doute la série Netflix de 2019 qui a participé à remettre la licence sur le devant de la scène. Et c’est donc tout naturel que ce nouveau jeu, le premier depuis 2015, en soit donc une adaptation, reprenant le design général (transposé en 3D), mais aussi des personnages comme l’acolyte Player. Reste donc la question de savoir si c’est une bonne adaptation, mais surtout, si c’est un bon jeu vidéo.
Carmen Sandiego, la seule personne au monde avec un pire bilan carbone que Taylor Swift
Comme une série, ce nouveau jeu Carmen Sandiego est divisé en épisodes, chacun se déroulant plus ou moins de la même manière, avec tout de même un fil rouge narratif déroulé tout au long de cette aventure qui permet de rester investi(e) dans un jeu dont le point faible est, disons le d’entrée, la redondance. Vous aurez toujours un temps donné, généralement entre cinq et sept jours, pour résoudre une enquête tournant autour d’un objet volé par l’organisation V.I.L.E. et son subtil acronyme. Vous démarrez dans un lieu donné du globe, constitué de trois points d’intérêts à visiter afin de recueillir deux types d’informations : en premier lieu, des indices sur le lieu suivant où s’est rendu le suspect, et en deuxième lieu des indices sur l’identité dudit suspect. Chaque lieu visité vous fait perdre du temps, et il vous faudra donc choisir judicieusement lesquels visiter afin de conserver assez de temps pour boucler l’enquête. La prise d’informations se fait généralement de trois manières différentes : un simple dialogue, un mini-jeu ou une phase d’exploration.
Une fois que l’on a recueilli assez d’infos sur une destination, on peut choisir la suivante parmi trois choix possibles à l’aide d’indices qui vont s’avérer de plus en plus en plus vagues au fil de l’aventure, passant de « le suspect a retiré des euros » à « le suspect souhaite acheter des pièces détachées de voiture« . C’est là que les phases d’exploration peuvent se révéler utiles, car celles-ci, en plus de nous offrir des indices, permettent aussi de récolter des informations sur le pays que l’on visite, informations qui sont consignées dans un codex et pourront être utilisées plus tard dans l’aventure. Un choix intelligent qui invite à la curiosité et permet au jeune public, cœur de cible de ce Carmen Sandiego, d’apprendre des choses.
Enfin, une fois que l’on arrive à la destination finale, il est l’heure de trouver notre suspect grâce aux indices récoltés. Pour cela, il va falloir faire correspondre les indices à des traits d’une base de données (n’a pas les yeux marrons, a peur de l’avion, porte une perruque…) afin de pouvoir éliminer des suspects et délivrer un mandat pour la bonne personne. Une fois encore, les indices deviennent de plus en plus vagues au fil du jeu, et à la fin on doit faire preuve d’une certaine capacité d’interprétation afin d’utiliser certains d’entre eux. De quoi faire travailler la logique ou inviter à faire une petite recherche internet afin d’en apprendre plus sur certains sujets. Même si le tout reste assez codifié, on a vraiment l’impression de mener un travail d’enquête et une vraie satisfaction se créée lorsque l’on retrouve le voleur. Cela, combiné à la faible durée des missions, fait que l’on a envie de continuer, malgré le fait que l’on fasse toujours plus ou moins la même chose.
Tout n’est pas rose (ou rouge, dans le cas précis)
J’ai aussi bien apprécié la véritable montée en difficulté à la fois au niveau logique mais aussi sur certains mini-jeux, qui donne l’impression de progresser et la sensation que Gameloft ne prend pas son public pour des andouilles. Je regrette tout de même qu’en fin de jeu, certains indices semblent ou trop vagues ou trop mal écrits, la faute peut-être à une mauvaise traduction, ce qui m’a fait rater deux ou trois enquêtes. Ceci est particulièrement visible dans le deuxième mode de jeu, nommé « dossiers de l’ACME« . Celui-ci, indispensable pour progresser dans l’aventure principale, propose des missions d’enquête du même acabit mais dans un enrobage plus simple : du pixel art, du texte, et des mini-jeux.
Générées procéduralement, ces missions semblent donc moins travaillées d’un point de vue logique, mais aussi plus difficiles. J’ai notamment pas mal galéré sur certains mini-jeux et j’ai souvent dû me creuser les méninges pour comprendre le sens des indices, quand cela était même possible (je n’ai toujours pas compris ce que « le suspect est membre du club de l’ours polaire » voulait seulement dire). Sans compter que le fait que ces missions soient quasiment uniquement textuelles enlève le charme de la variété et des nombreux décors modélisés dans l’aventure principale.
Je comprends la volonté de proposer autre chose et d’en donner aux joueurs pour leur argent, mais je me demande si l’inclusion de ce mode ne dessert pas un peu un jeu qui, jusqu’ici, semblait pourtant très bien travaillé (à l’exception de quelques bugs très peu gênants). Néanmoins, et bien que je ne sois pas le cœur de cible, je peux sans aucun souci recommander ce Carmen Sandiego, qui s’avère une très bonne surprise. Les enfants qui pourront y jouer seront sans doute ravis, d’autant plus s’ils aiment déjà le personnage, et le titre possède une dimension éducative qui n’est pas trop in your face. Le fait que certains indices soient plus abscons permet peut-être aussi d’inviter à poser des questions aux parents et d’inciter à la discussion et la découverte chez des jeunes un peu curieux.
Carmen Sandiego mais avec panache
-
Quelques défauts mais un jeu jeunesse plus qu'honnête - 70%
70%
Quelques défauts mais un jeu jeunesse plus qu'honnête
Dur de poser une note sur un jeu dont je ne suis pas le cœur de cible. Celle-ci se base donc non pas sur mon ressenti en tant que femme adulte, mais sur l’intérêt que l’expérience peut avoir sur des enfants. Et en cela, Carmen Sandiego est une franche réussite. Malgré quelques problèmes, principalement concentrés sur ses missions secondaires, le titre de Gameloft est amusant, rythmé et même éducatif, tout en proposant une aventure d’une longueur plus qu’honnête pour les trente euros demandés. Une belle surprise qui témoigne d’un respect à la fois de la licence et du public.
Les +
- Très adapté pour un jeune public
- Missions qui s’enchaînent assez vite sans donner l’impression d’être bâclées
- Un fil rouge mine de rien un peu intéressant
- La transposition du style graphique de la série en 3D est réussie
- Éducatif sans donner l’impression d’être à l’école
- Une bonne variété de mini-jeux
Les -
- Assez redondant et plutôt fait pour être picoré
- Certains indices assez abscons
- Le mode « dossiers de l’ACME » en dessous du mode principal