Que feriez-vous si par un beau matin votre grand-père vous confiait sa ferme ? Je vous coupe tout de suite, vous n’avez pas le choix : le vieux croulant vous refile la patate chaude et vous devrez alors vous dépatouiller devant lui, assis les doigts de pieds en éventail sur un banc toute la journée. Harvest Life, rebaptisé pour l’occasion Ma Vie à la Ferme est un jeu de gestion de ferme bio sorti le 22 novembre qui nous rappelle qu’effectivement, la Nintendo Switch attire comme des moustiques vers une ampoule led des développements prévus ou sortis auparavant sur Steam. Citadins enfumés, campagnards émérites et camarades lunaires, enfilez vos bottes : ça va tâcher.
Le test du jeu résulte d’un code distribué par l’éditeur.
EShop, ton univers impitoyable
Balivernes et billevesées, nom d’un chien, diantre et j’en passe ! La Nintendo Switch continue de m’étonner, encore et toujours ; Harvest Life sort en version boîte. Le jeu de gestion de ferme développé par Just for Games édité par Rokapublish est disponible sur steam depuis le 10 novembre 2017 et nous fait donc l’honneur d’une sortie en grande pompe sur notre console préférée, pour un résultat malheureusement très contrasté. Plongeons sans détour dans l’univers impitoyable des bottes en caoutchouc, des bouses de vache à ramasser et des squelettes (?!) à émincer.
Ma Vie à la Ferme est un titre résolument accessible, de ceux que l’on piochait jadis sur le réseau social de Zuckerberg pour passer le temps, en cours d’informatique ou de philo. Son rendu se révèle assez sommaire et ses personnages semblent tout droit sortis d’une fusion entre un Mii et une bûche de bois sculptée par un Gepetto modérément alcoolisé un soir de pleine lune, autour duquel gravitent divers esprits farceurs. On dirige donc notre personnage au stick, choisi préalablement selon plusieurs modèles disponibles parmi les hommes et les femmes. J’ai personnellement opté le fermier roux en chemise de bûcheron. Dans un espace assez grand et diversifié, dont des passages se débloquent au fil de l’aventure en lâchant de grandes quantités de pièces d’or, nous avons l’embarras du choix pour mener notre ferme jusqu’aux frontières de notre imagination. Enfin, sur le papier… Nos tâches sont proposées par le grand-père, et celles-ci auront deux freins principaux : la gestion de la faim et de la fatigue, lesquelles se rechargent respectivement en mangeant des fruits récoltés et en se reposant dans notre nid douillet. Nous pouvons toutefois travailler par monts et par vaux, qu’il pleuve ou fasse nuit, équipé d’une lampe torche afin d’exploser notre compteur d’heures – comme dans la vie réelle, finalement.
L’accessibilité prônée sur l’autel du gameplay
Plusieurs fonctionnalités sympathiques voleront un sourire, parmi lesquelles tourner une roue de la fortune, lire le courrier pris dans sa boîte aux lettres ou encore renommer ses vaches. Une fois par jour, la roue sera l’occasion pour nous de glaner quelques pièces, d’or, des fruits ou des légumes, une jolie boîte de chocolat valant son pesant de cacahuètes ou encore de repartir bredouille. Quant au courrier, il apporte une petite touche d’humour bienvenue brisant un peu le 4ème mur car signé par les développeurs eux-mêmes. Ainsi, une routine assez salvatrice s’installe et Harvest Life se laisse savourer durant quelques heures. Mais le cœur du jeu est ailleurs : il faut produire, nom d’une pipe ! Ce Stakhanovisme choupinet inspiré par l’ancien propriétaire de la ferme nous pousse à toujours agrandir nos champs, et à acquérir davantage d’animaux. Nous pouvons planter des betteraves, des choux, des tomates, des carottes… notre boutique se parera de nos produits par centaines assez rapidement et ce ne sont pas les quelques clients qui feront drastiquement baisser les stocks.
La gestion de la ferme est assez sommaire afin d’être accessible à tous : jeunes joueurs comme néophytes, voire non joueurs peuvent ainsi se sentir à l’aise et non perdus au milieu d’innombrables données et facteurs s’entremêlant. Le titre reste malgré tout en priorité à destination des plus jeunes. Ainsi, nous n’allons pas nous endetter lourdement pour acheter du matériel, bien que le recrutement d’employés soit possible. Il n’y a pas non plus de système de mise en jachère et le bien-être de nos animaux s’opère en trois termes : abreuvoir, fourrage, nettoyage d’étrons. Les vaches réclament leur traite et les cochons ne sont là que pour faire plaisir aux passants. Notre petite maison rustique comporte la clé du repos, le lit, le résumé des statistiques et des faits accomplis ainsi que l’accès au mode construction. Une fois activé, une vue aérienne quadrillée de la ferme et des environs apparaît. Le joueur obtient alors la possibilité d’implanter comme il lui plaît (moyennant finances) des enclos, des animaux, des sols fertiles ou encore des arbres fruitiers.
<troll> Combats, amélioration du personnage : jusqu’où ira la Witcherisation des jeux ? </troll>
Les inconnus l’ont dit avec justesse, il y a le bon et le mauvais chasseur. J’ai donc profité de mon don d’ubiquité et ai créé deux fermiers ; l’un avait toute mon attention et mes efforts les plus sincères, quant à l’autre… disons qu’elle oubliait de nourrir le bétail, de planter ou récolter les fruits et les légumes, jeûnait et enchaînait les nuits blanches. Ceci afin de déterminer si malus et challenge il y a. L’engeance que j’ai créée tend à confirmer l’accessibilité du jeu : tombez de fatigue et un villageois vous ramènera chez vous, après un racket de quelques soues. Tombez sous les coups d’un loup ou d’un squelette (sigh) et ce sera le même tarif. En somme, le challenge est inexistant. C’est d’ailleurs l’occasion parfaite pour aborder un point incompréhensible du soft : les combats. Simplistes, les joutes demeurent une vraie corvée. Le personnage frappe dans le vide, sans aucun feedback ; aucune vibration ni aucun son et pourtant les ennemis trépassent à un mètre de la lame du fermier. Nous aussi d’ailleurs, car notre jauge de point de vie fond comme neige au soleil en début de partie. Ces combats subviennent par exemple au détour d’une quête vous amenant dans une crypte infestée de squelettes belliqueux, de laquelle vous devez délivrez le chien d’un jeune garçon. Longue et fastidieuse, cette quête n’a jamais su trouver résolution malgré mes innombrables tentatives : le script du chien est complètement à la ramasse (il suit le fermier à deux cases d’écart, ni plus ni moins) et ne sort pas de la crypte une fois la sortie trouvée. Je serai attentif à un possible patch corrigeant le tir.
Concernant les fameuses améliorations du personnage, évoquer les trois lettres “R-P-G” serait un affront irréparable. En réalité, récoltons le fruit de notre labeur et déposons-le dans notre boutique, les clients se serviront en laissant leurs précieux deniers. Tout cet argent récolté pourra être ensuite également dépensé dans des améliorations liées à la force, à la capacité d’eau transportable ou à l’efficacité du générateur d’électricité, fournissant le fourrage nécessaire au bétail. Il est par ailleurs possible d’augmenter les emplacements disponibles dans l’inventaire, et devenir un meilleur pêcheur. Concernant la coupe de bois ou la pêche, un mini-jeu sympathique se déclenchera. Notons l’utilisation du tactile en mode portable pour couper des rondins, en veillant à ne pas couper les pommes qui viennent de notre inventaire ; si tel est le cas, elles sont perdues ! Le tactile est oubliable car très mal géré ; notons à toute fin utile que Cut the Rope est sorti en 2010.
La partie qui fâche
Plusieurs bugs obligeant à fermer l’application sont venus ponctuer mes sessions, et j’en suis venu à redouter la pluie comme la peste tant les chutes de framerate peuvent être violentes en climat normand. Dans ce cas, la meilleure façon d’y remédier est de redémarrer le système, en espérant avoir sauvegardé il y a peu. La version Switch de Ma Vie à la Ferme n’est pas exempte de tout reproche et celle de Steam est mieux lotie, tout en étant moins chère de moitié. Les graphismes jurent par leur pauvreté et la direction artistique ne plaira pas à tout le monde. On nous promettait «des musiques fantastiques», et je dois calmer ces hyperboles ; répétitives et sans avoir vraiment d’identité, celles-ci portent efficacement le jeu sans plus. La durée de vie d’un jeu de gestion est généralement conditionnée par l’intérêt personnel du joueur ; chacun voudra atteindre un but différent. Encore faut-il en trouver, et en ce sens là Ma vie à la ferme est bien timide. Terminons en apportant des précisions sur la version française, à saluer mais également et surtout à peaufiner : Google Traductions ne remplacera jamais une équipe de traducteurs, convenons-en.
Ma vie à la ferme peut se jouer en multijoueur local mais je n’ai malheureusement pas pu le tester, car requérant une manette pro – Ben, si tu me lis, c’est une bouteille à la mer que j’envoie !
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Un titre décevant dans un genre très concurrentiel
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Un titre décevant dans un genre très concurrentiel - 35%35%
Résumé
Trop cher pour son contenu famélique et doté de tares conséquentes, Ma vie à la ferme ne s’avère être pas le choix idéal pour qui voudrait s’encanailler d’un jeu de gestion agricole. Ses graphismes et son gameplay attireront davantage les plus jeunes joueurs, qui n’auront hélas aucun tutoriel pour comprendre les tenants et aboutissants du soft. Il reste malgré tout agréable sur de courtes sessions, encore faut-il qu’elles se révèlent dénuées de bugs. A déconseiller en l’état et au tarif de lancement, prohibitif à souhait.