Sur les années DS et 3DS, rien ne semblait pouvoir arrêter Level-5, qui enchaînait les succès autant sur les jeux vidéo qu’en animation. Et puis, au fil des années, le public s’est lassé : jeux multi-retardés, localisation qui prenait parfois des années, mauvaise gestion des projets… en mauvaise santé financière, le studio a même fermé son antenne nord-américaine en 2020, de quoi nous laisser craindre ne plus jamais revoir de jeux des créateurs de Layton. Pourtant, quelques années plus tard, le studio semble aller mieux : plusieurs projets devraient sortir cette année et dans celles à venir, à commencer par Megaton Musashi W: Wired, qui nous intéresse aujourd’hui. Premier jeu Level-5 à sortir en Occident depuis Snack World : Mordus de Donjon, le titre a une grosse pression sur les épaules. Alors, retour gagnant ou pétard mouillé ?
Mecha, elle est où ma caisse ?
C’est donc avec un certain enthousiasme que je lance le jeu, et plus particulièrement son mode histoire. On est tout de suite accueillis par un tutoriel pas super bien fait mais qui laisse déjà entrevoir de nombreuses qualités dans le système de combat. Et puis c’est parti : de la narration. Et encore de la narration. Et encore. Et encore. Au final, cinquante-cinq minutes s’écoulent entre le tutoriel et le premier combat, cinquante-cinq minutes qui font qu’on a déjà oublié tout ce qu’on a appris au moment de se lancer dans la bataille. Ce n’est qu’un petit défaut, certes, mais il est témoigne d’un vrai problème que l’on rencontrera durant toute la dizaine d’heures que dure le mode histoire : on ne nous laisse que trop rarement jouer, préférant enchaîner les tunnels d’une narration faiblarde aux personnages peu intéressants et à la traduction très approximative (on notera par exemple un “réflexe” à la place de “reflet” dans un des menus du jeu). Quand tout le marketing s’est axé sur le côté mecha, c’est très dommage. Et toute aussi shōnen soit-elle, cette histoire d’adolescents partant combattre des extra-terrestres dans des gros robots peine à intéresser tant elle accumule les poncifs du genre.
Qui plus est, Megaton Musashi W: Wired ne respecte que peu le temps des joueurs malgré la présence d’un très efficace voyage rapide et tombe dans les aléas de J-RPG d’un autre temps, avec beaucoup de répétitions, les contrôles rendus aux joueurs juste pour marcher dix mètres, ou des personnages qui vous donnent rendez-vous dans un endroit A uniquement pour vous dire qu’ils ont besoin de vous parler dans un endroit B. Non seulement c’est agaçant, mais tout ce temps perdu fait que l’excitation des combats (on y vient) retombe comme un soufflé et j’ai dû plusieurs fois lutter pour ne pas sombrer dans le sommeil. Je ne suis certes pas doté d’une attention à toute épreuve (et mercé le TDAH) mais c’est très rare que je m’ennuie autant devant un jeu vidéo. D’autant plus dommage que les décors et personnages sont plutôt jolis, et l’animation vectorielle couplée aux déplacements en 2D n’est pas sans rappeler le charme des jeux Vanillaware.
Ferraille (‘n’ B Fever)
Heureusement, dans cet océan de médiocrité surnagent quelques ilots de bonheur grâce à la personnalisation de votre mecha et les combats. Grand classique du genre qu’on peut notamment retrouver dans la série des Armored Core, vous pouvez créer votre mecha de la tête aux pieds. Vous ramasserez en combattant de très nombreuses pièces de qualité variable qui pourront servir à directement équiper votre robot, ou pourront être démontées afin de servir de pièces détachées pour vos créations. La quantité de loot pourra en rebuter certains : ce n’est pas mon cas mais les options de tri auraient néanmoins pu être plus travaillées afin de pouvoir plus facilement s’y retrouver. Vous devrez aussi optimiser la carte mère de votre robot en fonction du comportement que vous souhaitez lui faire adopter : plutôt offensif, plutôt défensif, misant sur les attaques de mêlée ou à distance ? À vous de choisir ! Vous pouvez même créer des puces à intégrer sur ladite carte mère, en passant par l’un des plus imbitables arbres de compétences qu’il m’ait été donné de voir. Malgré ce souci, il se dégage un plaisir certain dans l’optimisation autant mécanique que visuelle de son mecha.
Il en est de même du système de combat de Megaton Musashi W: Wired, qui est assez poussé et offre tout un éventail de techniques aux joueurs : des tirs de loin, des attaques au corps-à-corps, la possibilité de parer, un boost, une esquive, etc. Tous les changements opérés au garage se retrouvent a fortiori sur le terrain et cela aide beaucoup à rendre l’univers crédible. On passe avec fluidité d’un ennemi à l’autre, d’une attaque à l’autre, on balance des attaques spéciales avec des effets sympas (comme la vue cockpit) et des cris très shōnen des personnages et on se sent invincible… et sans doute un peu trop, même. Car là est le vrai problème des combats : à part en endgame (et encore), ils sont beaucoup trop faciles. Dès lors, pourquoi passer des heures à optimiser le moindre détail de son mecha si de toute façon spammer le bouton Y et les attaques spéciales permettent de remporter le combat ? L’amour du beau jeu, je veux bien, mais il ne faut pas trop pousser.
En ligne, c’est pas forcément en mieux
Vous pouvez éventuellement aller chercher un peu plus de challenge dans les modes en ligne, qui proposent des missions à faire en groupe (avec généralement de plus gros boss) et des combats en arène, mais tout ceci n’amusera vraiment que les plus compétiteurs d’entre vous, qui pourront essayer de peupler les serveurs pour l’instant désespérément vides : malgré le cross-play, le matchmaking est très long et il arrive souvent que le jeu ne trouve simplement pas de mission en groupe à rejoindre. Faute de pouvoir vraiment s’amuser à plusieurs, on pousse donc dans le solo, espérant désespérément que ça décolle à un moment ou à un autre, mais cela n’arrive vraiment jamais et l’on finit même par se lasser des niveaux et ennemis qui se ressemblent tous.
Loin de marquer le retour en fanfare de Level-5, le titre m’a finalement plutôt donné envie de bâiller. Même le reboot de Sakura Wars version 2019, qui souffre pourtant de défaut similaires, m’a plus amusé grâce à sa galerie de personnages très attachants qui compensaient ses carences au niveau du gameplay. Tournez-vous donc plutôt vers ça si vous cherchez un jeu de mecha simple, ou alors vers Armored Core 6 ou DAEMON X MACHINA si vous êtes en recherche de challenge. À part les fans de l’anime, j’ai du mal à voir qui pourra être satisfait de l’entre-deux opéré par Megaton Musashi W: Wired.
Megaton Musashi W: Wired, le retour en force de Level-5 ?
-
Quand robot rime avec dodo - 55%55%
Quand robot rime avec dodo
J’aime les méchas, j’aime la direction artistique, j’ai de la sympathie pour beaucoup de jeux de chez Level-5 : c’est donc vous dire si j’avais envie de l’aimer, ce Megaton Musashi W: Wired. Malheureusement, et malgré des qualités évidentes dans le système de combat et la personnalisation, je me suis beaucoup ennuyé. Pour une fois, je me demande s’il n’aurait pas mieux valu qu’il reste un gacha game jouable sur de plus courtes sessions. Les fans de l’anime et le jeune public pourront néanmoins y trouver leur compte.
Les +
- La direction artistique est chouette, surtout sur les phases en 2D
- Le design des méchas est réussi, entre mignonnerie et puissance
- Quelques bonnes compositions musicales
- Passer du temps à bidouiller son robot est très agréable
- Le système de combat est plutôt complet
Les -
- Écriture pas au niveau
- Beaucoup trop axé sur la narration
- Manque cruel de rythme
- Combats trop faciles qui n’incitent pas à utiliser à fond toutes les mécaniques
- Serveurs en ligne déjà assez vides
- Quelques chutes de framerate lors des affrontements
- Ennemis peu variés et qui se ressemblent un peu tous