Dans la longue liste des portages Switch, NieR Automata fut probablement l’un des plus réclamés. Plébiscité aussi bien par la presse que par les joueurs des autres plateformes l’ayant accueilli, NieR Automata nous fait enfin le plaisir de se poser sur la console de Nintendo dans son édition “The End of YoRHa”. Pour ma part, il s’agit une découverte totale et c’est un honneur de pouvoir écrire le test de ce qui est, à mes yeux, un chef-d’oeuvre du jeu vidéo.
YoRHA plus rien à perdre
L’intrigue de NieR Automata commence d’une façon relativement classique qui ne détonnerait pas dans un shonen à succès. Des millénaires dans le futur, notre planète n’est plus qu’une sinistre ruine après qu’une invasion extraterrestre ait forcé les êtres humains à se réfugier sur la Lune. Ne restent plus que les machines, armes créées par les envahisseurs, et les androïdes, développés par l’humanité pour éliminer les machines dans l’espoir de rendre la Terre de nouveau habitable.
Dans ce contexte de lutte permanente, le jeu se concentre sur un duo d’androïdes composé de 2B, à l’apparence féminine, et de 9S, au juvénile faciès masculin. Le joueur incarne 2B tandis que 9S fait office de soutien dans les différentes situations qui se présenteront au cours de l’aventure. Un terrible voyage commence alors pour nos deux héros qui auront à affronter des machines meurtrières certes, mais bien pire encore.
Un gameplay diversifié au possible
J’étais plutôt ignorant de NieR Automata avant de le lancer, si bien que je pensais qu’il s’agissait d’un jeu d’action pur jus. Cette conception des choses a été rapidement battue en brèche quand le jeu s’est ouvert sur une séquence shooter aérien contre une nuée de machines. Par la suite, un gameplay en 3D de beat’em all reprend rapidement le dessus et occupera la majeure partie de votre temps mais ces séquences de shooter reviendront régulièrement, allant même jusqu’à constituer un combat de boss dans son intégralité. Des phases en 8-bit sont même de la partie, là encore avec un gameplay spécifique. En résumé, on ne saurait reprocher à NieR Automata d’être répétitif, loin de là.
Il n’empêche que l’action et les combats restent au coeur du jeu : les affrontements contre les machines rythmeront votre avancée, parfois de façon impitoyable. Entre combats de masse à faire pâlir les amateurs de musô et les terribles boss qui vous attendent, on sent que PlatinumGames se plaît à nous faire sentir bien petits face à nos adversaires, dans tous les sens du terme. On retrouve en effet le goût du gigantisme propre au studio avec des environnements et des ennemis parfois immenses.
Les combats exploitent les capacités offensives de 2B (“B” faisant référence à son modèle “Battle”) en alternant entre arme légère, arme lourde et l’utilisation du Pod, petit robot d’assistance capable de tirer à répétition et d’utiliser certaines capacités destructrices. Les amateurs de Bayonetta ne seront pas dépaysés en ce sens, même si on peut reprocher à NieR Automata un léger manque de profondeur dans ses combos. Passer d’une arme à une autre n’apporte pas de changements particuliers et on reste un peu sur notre faim de ce point de vue.
En parallèle de la quête principale, le jeu propose son lot de quêtes annexes qui ont le mérite de se diversifier elles aussi. Bien évidemment, on n’échappe pas à quelques demandes de ramassage de la part de certains PNJ mais d’autres histoires plus émotionnelles et développées vous attendent, pas d’inquiétude là-dessus.
Une technique entre soulagement et frustration
Disons le tout de suite : NieR Automata n’est pas spécialement beau. Si l’apparence et la modélisation de ses protagonistes et de ses boss sont bien évidemment à saluer, les environnements ne resteront pas dans les mémoires. La direction artistique propose des graphismes réalistes qui font davantage ressortir les couleurs très ternes et les textures faisant grise mine. D’un autre côté, on imagine mal des décors post-apocalyptiques débordant de couleurs mais il n’empêche qu’on ne saurait justifier la tristesse de l’ensemble par le scénario du jeu. Cela dit, la Switch n’est pas nécessairement à blâmer puisque le rendu n’est pas beaucoup plus flatteur sur des plateformes plus puissantes. Certes, la version Switch se contente d’un framerate bloqué à 30 images par seconde mais celui-ci a le mérite d’être stable, contrairement aux versions concurrentes dont les 60 images par seconde ont tendance à jouer sauvagement au yoyo.
En revanche, j’ai moins bien accepté les bugs et crashs au cours de mes parties : les uns empêchaient le lancement de certaines quêtes (annexes heureusement mais quand même) et les autres m’ont souvent forcé à recommencer certains pans entiers du jeu, celui-ci étant dépourvu de sauvegarde automatique. Le joueur doit en effet sauvegarder régulièrement dans des points d’accès, très nombreux certes, mais j’en suis venu à enregistrer ma partie toutes les deux minutes de peur de perdre encore une fois ma progression. Retenez néanmoins que ces divers problèmes ne m’ont pas empêché de terminer le jeu, ni de l’apprécier que ce soit en mode TV ou en mode Portable. Même les problèmes récurrents de caméra n’ont pas eu raison de mon envie de poursuivre l’aventure et pourtant, j’aurais depuis longtemps lâché un jeu moins envoûtant.
YoRHa-t-il une fin ?
NieR Automata est un jeu qui m’a laissé perplexe et ce, pour plusieurs raisons. La principale m’a quelque peu inquiété. Ne vivant pas dans une grotte, j’avais évidemment entendu parler de l’oeuvre de Yoko Taro avant d’y jouer pour la première fois. Que ce soit dans la presse ou de la part d’amis, les avis étaient tous unanimes sur le fait que NieR Automata est un grand jeu, une oeuvre bouleversante qui méritait sa réputation. Pourtant, j’ai mis du temps à l’apprécier.
NieR Automata n’est pas un jeu parfait, loin de là. Il n’est pas spécialement beau, son gameplay n’a rien de révolutionnaire et est rempli de défauts parfois bien irritants. Certes, il peut se targuer d’une bande-son exceptionnelle et d’une atmosphère soigneusement ficelée mais je peinais à comprendre ce qui avait bien pu justifier un tel engouement. La réponse m’est venue à la toute fin du jeu.
Il faut savoir une chose primordiale sur NieR Automata : le jeu est loin d’être fini quand viennent les crédits de fin. PlatinumGames et Square Enix ont eu en effet l’idée d’inclure une forme de NewGame+ plutôt originale : il est possible de faire le jeu de trois points de vue différents avec des temporalités différentes. Explication : la première run se fait du point de vue de 2B. La deuxième revisite les mêmes évènements mais du point de vue de 9S avec des différences de gameplay mais aussi de perception de l’histoire du jeu, 2B et 9S étant séparés par moment. Cette deuxième run met en avant le premier plot twist du jeu avec la révélation d’une vérité aussi cruelle qu’ironique sur les motivations de nos deux androïdes bien aimés. Alors que le joueur pourrait être laissé le coeur brisé par ce retournement, voilà qu’une troisième run vous est proposée.
Cette troisième partie est une suite directe des deux précédentes dans la peau (ou devrais-je dire l’alliage ?) d’un troisième androïde rencontré très brièvement auparavant. Ce nouveau pan de l’aventure nous permet d’atteindre un point culminant dans le récit, occasionnant de nouvelles révélations encore plus terrifiantes, complexes et philosophiques qu’auparavant. Pour qui prend le temps de réaliser ses trois runs et d’expérimenter ses 5 fins différentes (ce qui m’a pris vingt-cinq heures en tout), NieR Automata dévoile ses secrets les plus sombres mais aussi les plus brillants. Un pari risqué mais gagnant.
NieR Automata a beau être doté de certains défauts, il fait partie de ce club ultra select des jeux que l’on apprécie bien au-delà de leur nature divertissante. PlatinumGames et Yoko Taro ont signé une oeuvre philosophique qui a permis au jeu vidéo d’évoluer vers un stade inédit. NieR Automata a ouvert une nouvelle voie à ce média que nous aimons tant mais d’une façon inattendue et complètement folle. On nous présente souvent l’avenir du jeu vidéo dans les nouvelles technologies qui permettront d’atteindre un niveau de réalisme et d’immersion toujours plus élevé mais une autre option s’est alors présentée : le jeu vidéo du futur pourrait aussi être celui qui parviendra à briser le quatrième mur avec plus d’impact et de bouleversement que le traditionnel “Thanks for playing!” de la part des développeurs. NieR Automata pourrait bien avoir été un de ces jeux, peut-être même le premier si un certain Undertale ne l’avait pas précédé. Ou son prédécesseur, NieR premier du nom.
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Un chef-d'oeuvre imparfait mais extraordinaire - 95%95%
Un chef-d'oeuvre imparfait mais extraordinaire
NieR Automata est le premier jeu qui me laisse sceptique aussi longtemps avant de me convertir aussi brusquement. Il est impossible de rester de marbre face au destin de 2B et 9S, ni de ne pas se sentir à la fois émerveillé et floué par le génie de Yoko Taro. On encaisse les coups que nous assène l’histoire édifiante de cette extraordinaire aventure, charmé par ses musiques envoûtantes et sa réflexion philosophique dépassant l’écran et la manette pour nous toucher en plein coeur. Une oeuvre d’art exceptionnelle que tout gamer digne de ce nom se doit de connaître.
Les +
- La diversité et le renouvellement du gameplay
- Des musiques exceptionnelles
- Une histoire pleine de retournements
- Une atmosphère mélancolique inimitable
- Des protagonistes attachants
- Des combats nerveux à souhait
- Un gigantisme écrasant
- Une façon de briser le quatrième mur édifiante
Les -
- Des problèmes de caméras
- Un gameplay qui manque parfois de profondeur
- Des bugs et des crashs occasionnels
- Des visuels qui ne sont pas des plus beaux