J’ai deux passe-temps favoris dans la vie : tenter de faire pousser tout et n’importe quoi dans les pots en terre cuite de mon balcon et découvrir des jeux vidéo indépendants. Dans les deux cas, le résultat final est plus que fluctuant, mais l’apparition de jolies fraises en plein mois de mai, alors que je pensais n’avoir que quelques mauvaises herbes et la déception provoquée par une potentielle pépite vidéoludique une fois manette en main activent en moi le même mécanisme : l’envie d’être surpris après une longue attente. Cette fois-ci, mon attention s’est portée sur Resolutiion, un obscur jeu d’aventure en 2D en vue du dessus, développé par deux frères allemands et que j’avais honnêtement perdu de vue. Heureusement pour lui, le bougre vient tout juste de montrer ses premiers bourgeons sur le Nintendo eShop. Et vu que nous sommes sur Switch-Actu et non pas dans les pages de Rustica, il est grand temps de voir si la plante de Monolith of Minds nous a finalement donné un joli fruit à croquer après une bonne semaine à germer sur ma Switch.
https://www.youtube.com/watch?v=wk9v5w7ZEx0
Hyper Resolutiion Drifter
Évacuons le sujet de suite : oui Resolutiion ressemble énormément à Hyper Light Drifter. Des teintes mauve et turquoise de ses décors aux paysages ravagés par une guerre du passée, en passant par sa mini map alambiquée et sa vue du dessus si particulière, il est vrai que nos premières minutes dans Resolutiion sont résolument marquées par le mimétisme troublant entre le titre de Monolith of Minds et celui d’Heart Machine. Malgré tout, réduire l’oeuvre des deux frangins qui composent ce petit studio allemand à une simple copie d’Hyper Light Drifter serait malhonnête tant celui-ci tentera par la suite de se démarquer en nous proposant quelque chose qui leur est Ô combien plus personnel. Mais il faudra avant toute chose vous accrocher et survivre à la prise en main plus que rugueuse du titre.
Car Resolutiion, c’est un peu comme votre toute première bagnole. Elle vous amène bien d’un point A à un point B sans anicroche, mais vous pouvez dire adieu à la climatisation et à la direction assistée pour rendre votre trajet plus confortable. Resolutiion est un titre brut de décoffrage, à la limite du old school, où tout se découvre à la dure. L’apprentissage et l’affichage des contrôles se fera par exemple directement dans les menus et aucun tutoriel ne viendra interférer avec vos débuts dans le jeu. Seulement, si cela peut paraître bienvenu à l’heure où les interfaces utilisateurs prennent de plus en plus de place sur nos écrans, force est de constater que ça ne fonctionne pas avec le titre de Monolith of Minds.
Celui-ci nous force ainsi à effectuer de nombreuses actions de manière contre-intuitives – rester immobile devant un PNJ pour démarrer une discussion, laisser votre bouton Y enfoncé pour attaquer avec une vitesse optimale – qui nous laissent parfois pantois sur la marche à suivre pour continuer notre aventure. Rajoutons une demi-douzaine de lignes de dialogues qui n’ont pas encore fini d’être traduits (saluons tout de même l’effort de la localisation en français), certains décors qui obstruent parfois notre champ de vision et un système de voyage rapide que l’on débloque que bien trop tard dans notre aventure – nous forçant à explorer cet étrange univers à coup d’allers-retours incessants – sur la liste des erreurs de jeunesse du studio allemand et nous obtenons un titre à l’ergonomie générale flirtant avec la limite du mauvais.
L’habit ne fait pas le moine
Mais malgré tout, j’ai fini par m’attacher à Resolutiion comme on se prend d’affection pour sa vieille voiture inconfortable au fur et à mesure que l’on découvre que ce ne sont pas les tableaux de bord tactile et les enceintes Dolby Atmos qui nous mènent à bon port. Resolutiion tente lui aussi de nous emmener quelque part et met pour cela l’étrange destin d’un mystérieux tueur amnésique – et de l’IA qu’il doit alimenter de ses souvenirs – entre nos mains. Dans un univers que tout semble indiquer comme étant virtuel, nous devrons partir à la recherche du passé de notre soldat tout en nous perdant – littéralement tant se repérer dans le jeu de Monolith of Minds semble être volontairement complexe – dans un monde ou chat géant et robots belliqueux se côtoient. Et ça tombe bien : Resolutiion excelle quand il s’agit de récompenser notre âme d’explorateur en nous offrant, au gré de nos divagations, de nouveaux pouvoirs, des boost de santé ou d’endurance et, surtout, de nouvelles clefs de lectures nécessaires à la compréhension du monde qui nous entoure.
À tel point que leurs découvertes finissent par mettre à mal notre conception à première vue manichéenne des différentes forces qui nous entourent et nous poussent par la même occasion à ne plus faire entièrement confiance à cette vieille tradition du jeu vidéo qui consiste à nous faire croire que n’importe quel mentor qui nous demande d’allé tuer une méchante créature démoniaque à forcement raison. Resolutiion préfère ainsi ne pas nous expliciter les arcanes de son univers et fait plutôt le pari que nous ferons le bon choix avec le peu d’éléments que notre curiosité nous aidera à glaner. Avec des thèmes abordés aussi divers que la condition humaine, les dérives du capitalisme, l’écologie, la propagande d’état ou la religion, le jeu du studio allemand se perd – et nous avec parfois – dans une narration surdécoupée et disséminée aux quatre coins de son monde tout en nous offrant, dans le même temps, une jolie carotte pour nous pousser à l’explorer et à le comprendre malgré la présence de nombreux ennemis sur notre route.
Fight Blurp
Et nous touchons là au défaut le plus regrettable, selon moi, de Resolutiion : le feeling de ses combats. C’est simple, une grande majorité des affrontements contre les boss du jeu et des nombreuses escarmouches qui ont ponctué ma progression m’ont plus donné envie d’abréger mes souffrances que celle de mes adversaires. Les hit box mal gérées, les déplacements légèrement flottants de notre avatar et les paternes souvent difficilement lisibles des ennemis m’ont ainsi poussé à fuir les rixes au maximum voir, pire, à lâcher ma Switch pour une courte pause. Les combats de boss s’en sortent à vrai dire un peu mieux. Originaux autant dans leur forme que dans leurs mécaniques pour en venir à bout, ils ne réussissent cependant pas à nous faire oublier les problèmes précédemment cités, tout en faisant peser au-dessus de nos têtes une épée de Damoclès avec marqué sur son tranchant un charmant “ton dernier check point est placé bien trop loin de là où tu es maintenant “. Et comme le dit l’adage : trente kilomètres à pied, ça use les souliers.
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Resolutiion partielle - 53%53%
Summary
Récolte finalement mitigée pour Resolutiion. Son univers qui se laisse découvrir à force d’allers-retours et ses nombreux secrets qu’il est nécessaire de trouver pour avoir une vision globale de l’histoire peinent à masquer la trop grande rugosité de son gameplay. Si le côté old school de sa prise en main et son esthétique fortement inspirée d’Hyper Light Drifter pourront plaire à certains, les autres devront cependant s’accrocher s’ils veulent seulement toucher du doigt tout ce que le titre de Monolith of Minds cherche à leur montrer.
Les +
- Un univers intriguant …
- La curiosité toujours récompensée
- Entièrement traduit en français…
- Une réelle intention de nous questionner sur nos actes dans le jeu.
- Quelques moments de grâce dans sa narration.
Les -
- … trop fortement inspiré d’Hyper Light Drifter.
- … malgré des oublis dans certains dialogues.
- Des sensations de combats aux fraises
- Une ergonomie des menus et des contrôles au minimum.
- Difficile de se repérer dans ce monde