Gérer un parc d’attractions, n’est-ce pas un peu le rêve de tous les enfants ? C’était en tout cas celui de Chris Sawyer, qui s’est attelé en 1999 à le rendre accessible en développant seul – et en langage assembleur, une folie – le premier RollerCoaster Tycoon, un titre perfectible mais novateur qui connut une suite 3 ans plus tard qui en corrigeait la plupart des défauts. Mais voilà, sortir un jeu de gestion 2D en 2002 était une hérésie, et Atari a rapidement confié à Frontier Developments la tâche de développer RollerCoaster Tycoon 3, toujours sous le chapeautage de Sawyer. Le résultat ? Sans doute le meilleur épisode de la franchise, qui marie parfaitement le côté gestion et le plaisir de construire des parcs et des montagnes russes en 3D, et un succès commercial et critique indéniable : malgré ses limites techniques évidentes (4:3, résolution limitée…), il est resté très joué jusqu’à la sortie de son successeur spirituel, Planet Coaster, notamment grâce à une communauté de modding très impliquée. J’y ai moi-même englouti des centaines d’heures : autant vous dire que je n’aurais jamais pu penser pouvoir un jour y jouer sur une console de Nintendo, a fortiori hybride. Mais était-ce seulement un titre adapté à la Switch ?
T’as ctile ? Non, j’ai pas
Lancer RollerCoaster Tycoon 3: Complete Edition s’apparente à retrouver dans son grenier une boîte contenant des jouets de notre enfance : tout est là, exactement comme nous l’avions entreposé 15 ans plus tôt, et une vague de nostalgie nous prend face à la vision de ces menus bleus un peu datés. Frontier n’a pas voulu réinventer la roue : point de remake ou de remaster, le titre est le même à l’exception de quelques améliorations faites sur le confort de jeu, en premier lieu desquelles la résolution qui nous permet enfin d’y jouer en HD et en 16:9, mais aussi des temps de chargement largement raccourcis par rapport à la version originale (13 secondes pour lancer une mission sur Switch, là où la vieille édition Platinum sur PC met 1 minute 34 !).
On saluera de plus le travail sur la toute nouvelle interface de cette version Switch, qui vous permet de naviguer dans les menus aussi confortablement que possible à la manette : les boutons L/R, les joysticks et la croix directionnelle suffisent, tandis qu’un pointeur placé au milieu de l’écran nous permet de sélectionner ce que l’on veut dans notre parc. Si l’on trouve le système un peu lourd au début, on prend assez rapidement le coup de main et les créations s’enchaînent par la suite avec facilité – à défaut de rapidité. Reste que l’on regrettera l’absence inexplicable de support du tactile en mode portable, qui aurait pu grandement nous faciliter la vie, ainsi que le manque d’un “retour arrière” qui nous permettrait de corriger nos erreurs plus facilement.
Plus Cedar Point que Disneyland
Dans le rayon des regrets, on notera aussi les quelques bugs qui ont résisté au poids des années, notamment au niveau de la caméra, toujours aussi douée pour se quicher derrière les reliefs du terrain quand on essaye de construire un coaster. De manière générale, le fait qu’aucun mode tactile ne soit présent et que, donc, placer des éléments de décors et des rails soit beaucoup plus long qu’à la souris fait que l’on ne joue pas au même RollerCoaster Tycoon 3 sur PC et sur Switch : ici, l’accent est moins mis sur la décoration et la personnalisation que sur la gestion et l’on construit des montagnes russes aux stations vides et sans atours. Cela sera plus ou moins un défaut en fonction de votre style de jeu et, dans tous les cas, c’est le prix à payer pour pouvoir transporter un tycoon aussi complet partout où l’on va.
Complet, oui, car, comme son nom l’indique, cette Complete Edition inclut le contenu du jeu de base ainsi que celui de ses deux extensions : Délires Aquatiques ! et Distractions Sauvages. Au menu, 39 scénarios dans le mode “Carrière” ainsi que la possibilité de créer des parcs aquatiques et animaliers : sachant qu’il faut tabler sur deux heures de jeu pour compléter les objectifs fixés par chaque scénario, cela vous donne une durée de vie absolument phénoménale et ce, sans même aborder le mode bac à sable qui vous permettra de créer le parc de vos rêves les plus fous – sans que le jeu ne se mette à ramer dès que l’on construit quelque chose de trop grand comme c’était le cas en 2004. Si certains mods communautaires manqueront certainement aux habitués du jeu et aux amoureux de la personnalisation à outrance, la plupart d’entre vous seront satisfaits par ce que propose RollerCoaster Tycoon 3: Complete Edition en l’état, avec ses soixante-dix types de montagnes russes et sa petite centaine de flat rides. Les nouveaux venus, notamment, pourront être surpris par la profondeur de l’extension Distractions Sauvages qui, sans atteindre le niveau d’un Zoo Tycoon, rajoute véritablement un jeu dans le jeu et vous oblige à prendre bien soin de vos animaux.
Gère le biz’ comme albanais de Suisse
Le titre accuse cependant bien ses 16 ans et certaines montagnes russes sembleront fantaisistes aux amateurs, tandis que les habitués de Planet Coaster regretteront le côté très “dirigiste” du placement du décors et des bâtiments. Ceux-ci (re)découvriront néanmoins dans le troisième épisode de la série un jeu de gestion bien plus exigeant que ce à quoi Frontier nous a habitué dernièrement : certains objectifs vous demanderont une gestion stricte des prix et de savoir aménager votre parc de manière intelligente en composant avec le pathfinding un peu simpliste des guests (les visiteurs, dans le jargon des parcs à thème) qui viendront le visiter. Garder un œil sur les comptes sera toujours primordial pour optimiser les coûts, et il n’est pas impossible que vous ayez à recommencer quelques scénarios sur lesquels vous perdrez de l’argent sans bien comprendre pourquoi. En effet, s’il offre un bon didacticiel sur comment construire un parc, le jeu ne vous donne pas les clefs de la réussite et c’est souvent en faisant des erreurs que vous apprendrez : faites donc attention aux remarques faites par vos visiteurs pour les satisfaire !
De fait, et malgré des graphismes qui accusent un peu leur âge (même si le côté cartoonesque et coloré de l’ensemble fait que cela n’a pas tant vieilli que ça), le gameplay de RollerCoaster Tycoon 3: Complete Edition est toujours aussi agréable aujourd’hui : les bases posées en 2004 étaient si solides qu’elles tiennent encore en 2020. Il y a une raison pour laquelle la plupart des jeux de gestion de parcs à thèmes s’appuient encore sur ce qu’a construit le titre de Frontier : que ce soit en mode carrière ou en bac à sable, transformer un terrain vague en une destination touristique florissante provoquera encore chez les joueurs passionnés un frisson d’excitation et les créatifs ayant du temps disponible pourront, avec les mêmes outils, obtenir des résultats foncièrement différents et tous aussi réussis les uns que les autres. Une fois encore, l’adage est vrai : les bons jeux sont véritablement intemporels.
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L'âge lui va si bien
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L'âge lui va si bien
Les nostalgiques seront à coup sûr séduits par la perspective de pouvoir emmener RollerCoaster Tycoon 3 partout avec eux, mais ceux qui n’y ont jamais touché pourront découvrir un des rares jeux de gestion qui tente vraiment de s’adapter à notre console hybride, avec des contrôles pensés pour l’occasion et des graphismes peu gourmands qui sont un bel écrin pour ce qui reste un des mètre-étalon du genre. Même l’absence de tactile et les quelques bugs ne parviendront pas à effacer le sourire qui se dessinera sur votre visage pendant que vous créerez vos parcs.
Les +
- Un jeu de gestion pointu
- Énormément de contenu
- Durée de vie quasi-infinie
- Toujours actuel
- Bon travail sur l’interface Switch
- Temps de chargement très courts
- Relaxant
Les -
- Pas de tactile
- Caméra perfectible
- Moins de personnalisation que sur PC
Merci pour le test.
Sortira-t’il un jour en version physique. Je boycotte le dématérialisé.
Cela me semble très peu probable, malheureusement.
Excellent test
Merci beaucoup !